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Enseigner l'écriture aux élèves du secondaire grâce à l'enseignement expliciteEnseigner l'écriture aux élèves du secondaire grâce à l'enseignement explicite
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L’enseignement explicite de l’écriture : cinq incontournables pour soutenir tous vos élèves

Secondaire

Introduction

Comment se fait-il qu’une pratique pédagogique aussi efficace que l’enseignement explicite ne soit pas davantage utilisée au sein des classes du secondaire? La réponse est simple : les exemples concrets manquent pour faire le pont entre les recherches effectuées et le quotidien de l’école. Ainsi, dans quelle mesure l’enseignement explicite peut-il être au service de l’enseignement de l’écriture au secondaire? Comment cette pratique permet-elle de soutenir les élèves avec des difficultés d’apprentissage? Nous avons identifié, pour vous, les cinq contextes d’enseignement de l’écriture qui sont les plus propices à l’utilisation de l’enseignement explicite!

Mise en contexte: l’enseignement explicite

Bien que les articles et les formations portant sur l’enseignement explicite soient monnaie courante depuis quelques années, voici un rappel à propos de ses fondements. 

 

L’enseignement explicite : une stratégie d’enseignement efficace en lecture, en écriture et en mathématiques

La planification

L’étape de planification dans le processus d’écriture est souvent mise de côté. Combien de fois avons-nous demandé à nos élèves de remplir le plan de leur situation d’écriture sans, toutefois, leur montrer comment le faire? Combien d’élèves restent bloqués, sans idée, à regarder leur feuille blanche? Le blocage que vivent certains élèves peut être évité grâce à un enseignement explicite de la planification.

 

Tout d’abord, il convient de se demander comment nous voulons que nos élèves planifient leur texte, car il y a plusieurs façons de le faire : listes, tableaux, schémas, etc. Chaque façon devrait être l’objet d’une leçon différente pour que, finalement, le choix de la façon de planifier soit donné à l’élève afin de favoriser l’individualité de chacun. Nous nous attarderons ici sur l’organisation des idées en tableau. 

 

Dans la phase de modelage, l’enseignante peut partir d’une consigne de rédaction simple en lien avec le genre de texte à l’étude dans sa classe (par exemple, l’écriture d’un paragraphe de description en première secondaire). À l’aide de cette consigne, elle montre à l’élève à faire un remue-méninge : elle explique que toutes les idées doivent être nommées et notées. Même les idées les plus farfelues ou les plus saugrenues peuvent être une source d’inspiration. Ensuite, l’enseignante trace un tableau qui regroupe les composantes importantes liées au genre à l’étude (les aspects et les sous-aspects pour la description) et commence à placer les idées retenues dans le tableau. Elle doit ensuite combler les vides grâce à des idées nouvelles, elle verbalise donc toutes ses réflexions afin de montrer aux élèves comment organiser et structurer leurs idées. 

 

Pour ce qui est de la phase de pratique guidée, il est intéressant de s’inspirer du concept des cercles d’auteurs et, plus spécifiquement, des cercles de planification. En équipes de quatre, les élèves font le remue-méninge ensemble en nommant toutes les idées qui leur viennent en tête en lien avec une nouvelle consigne de rédaction. Ils peuvent ensuite se diviser en sous-équipes de deux et amorcer une organisation de leurs idées en tableau. Une mise en commun peut être effectuée avant la pratique autonome, qui donnera lieu à une rétroaction de la part de l’enseignante. En dernier lieu, dans le cadre de la pratique autonome, l’enseignante propose une autre tâche d’écriture aux élèves qui rédigent leur texte seuls, cette fois-ci. 



Enseignement explicite, la planification en tableau

 

Cette pratique est idéale pour l’apprentissage de tous nos élèves parce qu’elle instaure une valeur de partage et d’égalité, « l’échange d’idées en cercle de planification permet aux élèves de constater qu’il n’y a pas qu’une seule façon d’exploiter une idée » (Tremblay et Turgeon, 2019). L’enseignement explicite permet également de morceler une tâche souvent négligée de la part des élèves. Comme les cercles de planification permettent de « développer l’autonomie de chaque scripteur et, bien sûr, le plaisir et la motivation à écrire », il s’agit d’une pratique pédagogique inclusive et pertinente pour tous.

La mise en texte

La mise en texte selon l'enseignement explicite en écriture

Lors de la rédaction d’un texte, les élèves passent la majorité de leur temps sur l’étape de mise en texte. Ce n’est pas toujours ce qui est le plus efficace, c’est pourquoi il est important de leur montrer le processus de façon explicite. Logiquement, cette étape est directement en lien avec le genre de texte à l’étude au moment de l’enseignement (descriptif, justificatif, explicatif, etc.). C’est aussi une étape qui doit être réalisée en lien avec l’enseignement de la planification : les deux concepts vont de pair parce qu’ils impliquent, tous deux, la structure du genre à l’étude.

 

D’abord, l’enseignante doit présenter une banque de marqueurs de relation appropriés au genre de texte à l’étude. Par exemple, les marqueurs adéquats pour un texte narratif ne sont pas les mêmes que ceux qui conviennent à un texte argumentatif. Idéalement, les mots devraient être organisés selon le sens qu’ils expriment. Ensuite, partant d’un plan préalablement fait, l’enseignante fait un modelage de mise en texte en se demandant, à chaque changement d’idées, quel est le lien qu’elle veut exprimer entre ces idées et comment elle choisit le marqueur de relation approprié. Puis, pour la phase de pratique guidée, les élèves placés en équipe de deux peuvent poursuivre la rédaction du texte entamé par l’enseignante en se posant les mêmes questions que celles présentées durant le modelage. Enfin, la pratique autonome peut se résoudre à la rédaction d’un paragraphe de texte lors de laquelle l’accent sera mis sur le choix des marqueurs selon le lien que ces derniers expriment. 

 

Un tel enseignement permet de rendre clair un processus que nous tenons souvent pour acquis, mais qui ne l’est pas pour tous les élèves. La compréhension de la signification des différents marqueurs de relation est plus complexe que nous ne pouvons l’imaginer, même pour les élèves en fin du secondaire. L’enseignement explicite de leur utilisation peut donc favoriser la rédaction d’un texte clair et cohérent. 

La correction

La correction est l’étape sur laquelle les élèves ne passent probablement pas assez de temps et c’est sans doute parce qu’il s’agit d’une tâche lourde qui implique une charge cognitive considérable. C’est là tout l’avantage de procéder avec l’enseignement explicite : ce dernier permet de morceler cette tâche complexe et de la rendre plus accessible pour tous les élèves.

 

Un exemple de ce qui peut être enseigné explicitement pour favoriser une meilleure correction de la part des élèves est le repérage des constituants de la phrase de base, grâce au modelage de l’enseignante. En effet, grand nombre de règles découlent de cette observation : l’accord du verbe avec son sujet, la virgule qui détache le complément de phrase, etc. Cet outil permet aussi d’assurer une bonne syntaxe des phrases. À l’aide de deux ou trois phrases, l’enseignante peut identifier le verbe conjugué, puis le CP et le sujet à l’aide des manipulations syntaxiques appropriées. Ainsi, la structure des phrases sera dégagée et il sera plus facile de vérifier les autres accords et la ponctuation pour la phase de correction du texte. Pour ce qui est de la pratique guidée, le concept des dictées métacognitives peut être utilisé. Enfin, pour la pratique autonome, l’enseignante peut fournir un texte déjà rédigé aux élèves afin que ceux-ci mettent en pratique la stratégie de correction préalablement enseignée. 

La révision

La révision de texte selon l'enseignement explicite en écriture

La révision de texte se distingue de la correction en ce qu’elle concerne le contenu d’un texte et non la langue. Alors que nous mettons beaucoup l’accent sur la correction des textes des élèves, nous insistons peu sur ce que ces derniers peuvent faire concernant la cohérence et la progression de leurs propos. 

 

Il est donc possible d’utiliser l’enseignement explicite, par exemple, pour vérifier la reprise de l’information. Préalablement, un enseignement devrait être lié avec des procédés de reprise de l’information, afin que les élèves aient les processus et le vocabulaire nécessaires à cet exercice.

 

Comme modelage, l’enseignante peut prendre un extrait de texte et tenter de mettre en surbrillance toutes les expressions qui font référence au sujet du texte. Cela permettrait de mettre en relief les procédés utilisés pour ensuite s’assurer que ceux-ci sont justes et variés. Durant toute la phase de modelage, l’enseignante peut insister sur l’idée qu’il faut se mettre dans la peau de notre lecteur pour assurer une bonne révision : par exemple, « Est-ce que la personne qui lira le texte saura à quoi je fais référence avec l’usage de ce pronom? Son antécédent est-il dans la phrase précédente? » Comme pratique guidée, les élèves pourraient être placés en atelier de révision par les pairs. Ils pourraient utiliser un texte déjà rédigé et l’échanger avec un pair afin de reproduire la même démarche qu’avec l’enseignante : mettre en surbrillance les procédés de reprise de l’information, se questionner sur leur clarté, leur pertinence et leur antécédent. Cela pourra mener à une révision de leur propre texte en pratique autonome. 

La grammaire

Ce dernier aspect que nous abordons est un peu en lien avec le concept de correction abordé plus haut. L’enseignement de la grammaire est nécessaire afin que les élèves puissent appliquer leurs connaissances dans leurs textes écrits. La meilleure façon d’enseigner toutes les règles de grammaire est sans conteste l’enseignement explicite, les démarches de découverte pouvant nuire à la compréhension des élèves plus faibles, en plus de nuire à leur motivation si ces élèves se sentent impuissants face à un exercice inductif donné.  

 

Dans la phase de modelage, l’enseignante nomme la règle de grammaire et l’applique dans un contexte réel de phrase. Elle dit à voix haute toutes les étapes d’application de la règle et repère les informations pertinentes pour la mettre en œuvre. Un bon exemple serait les règles d’accord du participe passé, qui nécessitent toutes plusieurs étapes : identification du type de participe passé, repérage du donneur d’accord, reconnaissance du genre et du nombre du donneur d’accord et application de l’accord. Ces étapes sont cruciales à démontrer explicitement aux élèves. Pour se rendre à la pratique autonome directement applicable à la correction de texte, il faut mettre en œuvre une pratique guidée et une période d’exercisation qui se complexifiera au fil du temps. Nous pouvons aussi faire le lien avec les dictées métacognitives précédemment nommées, qui peuvent offrir un contexte plus proche d’une situation réelle d’écriture. L’intention est de guider les élèves vers une complexification de la tâche afin d’impliquer leurs connaissances déclaratives, procédurales et conditionnelles. 

Pour aller plus loin

À consulter
Références bibliographiques ou sources citées
  • Arseneau, R. et Nadeau, M. (2018). Expérimentation des dictées métacognitives : quels effets sur l’apprentissage de l’orthographe grammaticale en contexte francophone minoritaire ? Revue canadienne de linguistique appliquée, 21(2), 126–153. https://doi.org/10.7202/1058464ar.
  • Bissonnette, S., Richard, M., Gauthier, C. et Bouchard, C. (2010). Quelles sont les stratégies d’enseignement efficaces favorisant les apprentissages fondamentaux auprès des élèves en difficulté de niveau élémentaire? Résultats d’une méga-analyse. Revue de recherche appliquée sur l’apprentissage, 3(1), 1-35.
  • Bocquillon, M., Gauthier, C., Bissonnette, S. et Derobertmasure, A. (2020). Enseignement explicite et développement de compétences : antinomie ou nécessité?, Formation et profession, 28(2), 3–18. https://doi.org/10.18162/fp.2020.513.
  • Mercure, C. (2019). Retombées de lutilisation des technologies daide en contexte décriture sur les processus décriture délèves dyslexiques-dysorthographiques du premier cycle du secondaire. Mémoire. Trois-Rivières, Université du Québec à Trois-Rivières, 210 p.
  • Tremblay, O. et Turgeon, E. (2019). Collaboration dans les cercles d’auteurs : pistes pour travailler la planification. Vivre le primaire. 32(1), 11-13.
Rosalie Meloche-Dumas, Enseignante de français au secondaire et chargée de cours au département de didactique de l’Université de Montréal
Rosalie Meloche-Dumas
Enseignante de français au secondaire et chargée de cours au département de didactique de l’Université de Montréal
Béatrice Bédard, Enseignante du français au secondaire
Béatrice Bédard
Enseignante du français au secondaire

Un peu plus sur les autrices

Les deux autrices enseignent le français au secondaire dans un collège privé de la région de Lanaudière. Curieuses de nature, elles cherchent constamment à réfléchir et à trouver des façons innovantes d’enseigner le français. 

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