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3 pratiques pour anticiper les obstacles liés à la langue et à l’écrit dans la résolution de problème

Primaire

Introduction

Comme enseignant, on le sait : la résolution de problèmes mathématiques peut être compliquée pour les élèves. Elle nécessite de nombreux enseignements explicites, que ceux-ci soient liés aux stratégies, aux concepts ou aux procédures. Toutefois, ces fameuses résolutions de problèmes font également appel à la compétence à lire de nos élèves, ajoutant des obstacles pour nombreux d’entre eux.

Les obstacles de la langue écrite

En effet, la lecture d’une tâche de plusieurs pages sollicite les mêmes processus que lors d’une compréhension de lecture. Il arrive donc, tout comme lors des tâches de lecture, que les élèves entrent en surcharge cognitive en raison du décodage, du vocabulaire ou des nombreuses contraintes à comprendre au fil du texte. Parfois, les élèves peuvent être de bons lecteurs, mais n’avoir que très peu de référents culturels relatifs au contexte de la tâche. Par exemple, comprendre le principe d’un safari ou d’une billetterie pour un enfant n’étant jamais allé ou n’ayant jamais eu à se procurer lui-même des billets peut être abstrait. 

Heureusement, il existe plusieurs pratiques permettant de travailler la résolution de problèmes mathématiques en réduisant les obstacles liés à la langue et l’écrit. C’est le cas des causeries mathématiques à l’oral ou encore de l’utilisation d’images pour appuyer les tâches écrites.

1. La causerie mathématique : des maths en contextes signifiants

Le cadre d’évaluation du programme de formation de l’école québécoise met en lumière l’utilisation de la modalité orale pour prendre connaissance des compétences « Résoudre une situation-problème mathématique » ainsi que « Communiquer à l’aide du langage mathématique ». On n’a donc pas toujours besoin de résoudre dans des contextes « papier-crayon ». Dans un même ordre d’idée, le référentiel d’intervention en mathématique paru en 2019 propose différentes pratiques permettant de donner du sens à la mathématique, telles que les causeries mathématiques.

Dans notre environnement quotidien, nous sommes confrontés à beaucoup de petits problèmes mathématiques sans nécessairement avoir de papier ni de crayons sous la main :

  • Comparer les prix et les formats de deux produits à l’épicerie.

  • Mesurer la distance d’une course matinale.

  • Calculer ou estimer des quantités ou des fractions de nourriture pour un souper entre amis, etc.

Ne serait-ce pas à ces situations que nous devrions préparer nos élèves? Les causeries mathématiques permettent de travailler le calcul mental, les choix d’opérations, les différentes façons d’arriver à une réponse, les justifications mathématiques, etc.

2. L’utilisation de l’image pour contextualiser une tâche écrite

Garçon dans un parc aquatique

À l’approche d’une tâche de mathématiques, il peut être intéressant d’explorer visuellement le vocabulaire et les thématiques pouvant faire apparaître des difficultés de compréhension chez les élèves. Par exemple, si la tâche se déroule dans un parc aquatique et que certains élèves n’y sont jamais allés, il pourrait être intéressant, en amont, d’en visiter un virtuellement afin que les élèves voient le kiosque d’achat de billets ou bracelets, les différentes zones et animaux d’un parc aquatique, etc. Souvent, une dizaine de minutes suffisent à contextualiser la tâche et hop! Les élèves seront plus en confiance pour entreprendre la résolution (le lendemain, par exemple).

3. Et la couverture dans tout cela?

De plus, il ne faut pas sous-estimer le pouvoir des illustrations, qui favorisent la compréhension en lecture. Avez-vous déjà porté attention à l’illustration figurant sur la page couverture d’une tâche mathématique. Il peut arriver qu’elle soit complètement décontextualisée de la tâche. Il est important de prendre le temps de choisir judicieusement une illustration parlante pour les élèves. 

« Faire parler l’image amène les élèves à ne pas focaliser uniquement sur les nombres écrits en chiffres, mais plutôt à développer une idée générale de la situation, d’imaginer le contexte dans lequel le problème se déroule, mais également de déterminer les notions qui pourraient être utiles » - « Une image vaut mille mots mathématiques », Revue Vivre le primaire, printemps 2022.

Voici un exemple tiré de mon vécu. Alors que j’enseignais en 6e année dans une classe d’adaptation scolaire, l’une des tâches évaluées s’intitulait Le jour 100. Comme le nom l’indique, les élèves devaient planifier la fameuse Fête du 100e jour d’école pour les classes du préscolaire. Ils devaient donc planifier la tournée des enfants dans l’école, la création de chapeaux et colliers thématiques ainsi qu’une exposition de collections de 100 objets. 

Pour des élèves n’ayant jamais connu une fête du jour 100, nous sommes d’accord qu’il n’est pas évident de s’approprier entièrement la tâche. Imaginez que l’illustration sur la couverture du document est la suivante :

Personnellement, la première fois que j’ai utilisé cette évaluation, je n’avais même pas remarqué l’image tant je n’y accordais pas d’importance. Seulement, à la fin de la période, un de mes élèves est venu me voir pour me demander pourquoi il y avait un chandail et un ballon de soccer sur le document quand le contexte de la résolution de problème n’était pas du tout lié à ce sport! Cela apportait tant de confusion, alors que nous aurions pu nous servir de l’illustration pour faire des hypothèses ou des prédictions en début de tâche.

C’est à ce moment que j’ai retravaillé l’illustration, sur la couverture, afin que celle-ci soit utile à mon enseignement.

Bref, les illustrations permettent de réduire les obstacles liés à la langue et à l’écrit dans des contextes de résolution de problèmes en mathématiques. Il importe d’en tenir compte pour soutenir la réussite de tous nos élèves.

Pour aller plus loin

Références bibliographiques ou sources citées

Saboya, M. et al. (2022). Une image vaut mille problèmes mathématiques. Dossier spécial: évaluer au primaire. AQEP, Vivre le primaire, p. 23-26. 

Récit MST. Apprendre et évaluer autrement en mathématiques: Des ressources « coups de cœur » pour apprivoiser la causerie mathématique, [En ligne], 2024. [https://sites.google.com/csbe.qc.ca/evaluerautrementenmath/types-de-probl%C3%A8mes/causeries-math%C3%A9matiques/banques-dactivit%C3%A9s?authuser=0&pli=1] (Consulté le 20 décembre 2023).

Marie-Philippe Goyer
Orthopédagogue à l'Institut des troubles d'apprentissage

Un peu plus sur l'autrice

Détentrice d’un baccalauréat en adaptation scolaire et sociale, Marie-Philippe a travaillé en classes spécialisées ainsi qu’en orthopédagogie en milieux scolaires et privés. Présentement gestionnaire et créatrice de contenus à l’Institut des troubles d’apprentissage du Québec, elle satisfait sa curiosité professionnelle en collaborant avec des experts et pédagogues passionnés. Consultante pour l’entreprise ALEO VR, Marie-Philippe conçoit des jeux visant à rééduquer les troubles spécifiques en lecture grâce à la réalité virtuelle. Elle a également fondé l’entreprise ScolAide qui vise à outiller le plus grand nombre d’enseignants et d’élèves en difficulté par le biais de conférences, consultations, capsules vidéos et documentation en ligne. Passionnée de littérature jeunesse et récipiendaire du prix Étincelle de reconnaissance en lecture du MEES, elle a terminé un microprogramme en didactique cognitive des difficultés d’apprentissage de la lecture-écriture à l’UQAM et collabore au blogue J’enseigne avec la littérature jeunesse.

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